ENTRÉE 9 - RÉSEAUX SOCIAUX: ADDICTION PROGRAMMÉE
RÉSEAUX SOCIAUX: ADDICTION PROGRAMMÉE
La société contemporaine s’inscrit dans un régime de connectivité permanente, où les interactions humaines, les pratiques culturelles et les comportements individuels sont de plus en plus médiés par des dispositifs numériques. Parmi ces dispositifs, les réseaux sociaux occupent une place centrale. Ils désignent des plateformes numériques — telles que Facebook, Instagram, TikTok ou X — qui permettent la mise en relation, la diffusion de contenus, la captation de l’attention et la modulation des comportements. Leur fonctionnement repose sur des architectures techniques complexes, associant algorithmes de recommandation, interfaces adaptatives et logiques de viralité.
Cette transformation ne relève pas d’un simple progrès technologique. Elle repose sur des logiques de programmation, entendues comme des stratégies de structuration des usages, d’orientation des attentions et de modélisation des conduites. Ces programmations ne se limitent pas aux codes informatiques ; elles engagent des intentions économiques, politiques et sociales, et s’inscrivent dans une dynamique de captation généralisée.
De par un questionnement sur les effets comportementaux induits par ces dispositifs, il faudra interroger la manière dont les réseaux sociaux participent à une programmation des usages, susceptible de conduire à des formes d’addiction, d’en évaluer les conséquences, les sanctions pour les dérives et les remédiations.
Cette réflexion s’organisera en trois temps : d’abord en examinant la configuration sociétale numérisée dans ses fondements, ensuite en analysant sous forme de conséquences les formes différenciées de l’influence généralisée, et enfin en explorant les sanctions pour les dérives et les remédiations proposées par le BENZ PROTOCOL.
I/ L’addiction programmée envers les réseaux sociaux s’inscrit dans une configuration sociétale désormais numérisée et exposée à une dynamique d’influence généralisée.
I.1 Cette configuration sociétale est désormais numérisée dans ses fondements.
*/ Une dynamique principale repose sur les réseaux sociaux traditionnels: ll peut être établi que les réseaux sociaux dits “traditionnels” — Facebook, Twitter (désormais X), Instagram — ont constitué les premiers vecteurs de la numérisation sociétale à grande échelle. Leur émergence au tournant des années 2000 a permis une reconfiguration des interactions humaines, fondée sur la connectivité permanente, la publication instantanée et la mise en réseau généralisée des individus.
Facebook s’est initialement ancré dans une logique de connectivité familiale et ludique, favorisant les échanges entre proches, la diffusion d’images personnelles et la reconstitution de cercles sociaux. Cette orientation a contribué à banaliser l’idée d’une présence numérique continue, sans tension apparente. En parallèle, Twitter a posé les jalons d’une transversalité fonctionnelle : politique, médiatique, économique, culturelle. Son format court et ouvert a permis l’émergence d’une parole publique décentralisée, souvent virale, parfois stratégique.
Ces plateformes ont instauré une médiation algorithmique des contenus, où la visibilité ne dépend plus des choix des usagers mais de calculs d’engagement. Cette architecture a déplacé le pouvoir de sélection vers des entités techniques, amorçant une transformation profonde des usages cognitifs et sociaux.
La théorisation de cette dynamique peut s’appuyer sur Dominique Cardon, qui identifie les algorithmes comme des “machines de vision sociale” (À quoi rêvent les algorithmes, Seuil, 2015), et sur Antonio Casilli, qui analyse la mise au travail invisible des usagers dans les environnements numériques (En attendant les robots, Seuil, 2019). Ces travaux permettent d’établir que les réseaux sociaux ne relèvent pas d’une neutralité fonctionnelle, mais constituent des dispositifs normatifs orientant les comportements, les attentes et les formes de visibilité.
Une critique peut être formulée sur la naturalisation de ces usages : l’idée selon laquelle “tout le monde est sur les réseaux” masque les logiques d’enfermement attentionnel et de dépendance comportementale. L’illusion de liberté dissimule une programmation implicite des gestes numériques.
L’illustration de cette dynamique se retrouve dans les pratiques quotidiennes : le réflexe de consultation compulsive, la valorisation par les “likes”, la peur de manquer une information (FOMO). Ces comportements traduisent une internalisation des logiques de captation mises en place par les réseaux traditionnels.
*/ Une dynamique complémentaire repose sur l’intégration croissante de l’intelligence artificielle: l’intégration de l’intelligence artificielle dans les environnements numériques marque une inflexion décisive dans la structuration des usages. Là où les réseaux traditionnels se contentaient d’organiser la visibilité, les systèmes actuels cherchent à anticiper, modéliser et orienter les comportements en temps réel. Cette mutation repose sur des architectures prédictives capables de capter des signaux faibles, d’inférer des intentions, et de générer des contenus adaptés à des profils mouvants.
Ce glissement vers une logique de personnalisation algorithmique radicale transforme la relation entre l’usager et la plateforme : il ne s’agit plus seulement de proposer, mais de prescrire. Les interfaces deviennent des environnements adaptatifs, où chaque geste numérique est interprété comme une donnée exploitable, chaque pause comme un indice, chaque hésitation comme une opportunité de captation.
Les travaux de Shoshana Zuboff permettent de saisir la portée systémique de cette évolution. En identifiant un “capitalisme de surveillance” fondé sur l’extraction comportementale (The Age of Surveillance Capitalism, PublicAffairs, 2019), elle montre que les données ne sont pas seulement collectées, mais transformées en produits prédictifs destinés à orienter les conduites. Ce modèle repose sur une asymétrie informationnelle radicale, où les usagers ignorent les mécanismes qui les ciblent, tandis que les plateformes affinent leurs stratégies de captation.
Ce régime technique soulève des enjeux éthiques majeurs. La capacité des systèmes à anticiper les désirs, à simuler des interactions humaines, à générer des contenus émotionnellement calibrés, interroge les frontières entre influence, manipulation et automatisation de la subjectivité. L’usager devient un territoire à exploiter, un flux à moduler, une ressource à rentabiliser.
Cette dynamique se manifeste dans les usages quotidiens : recommandations de vidéos, ajustement des fils d’actualité, réponses automatiques dans les messageries. Ces dispositifs, présentés comme des aides, participent en réalité à une reconfiguration silencieuse de l’attention, de la mémoire et du jugement.
Ainsi, la numérisation sociétale s’est- elle consolidée autour de deux dynamiques techniques majeures : les réseaux traditionnels et l’intelligence artificielle. Cette double structuration ouvre désormais sur une logique d’influence généralisée qu’il convient d’examiner.
I.2 Cette numérisation est exposée à une dynamique d’influence généralisée des réseaux sociaux.
*/ Une orientation manifeste réside dans la transversalité des réseaux: les conduites numériques sont aujourd’hui façonnées par des mécanismes de suggestion algorithmique, de répétition comportementale et de valorisation sociale. Ces mécanismes relèvent de ce que Michel Foucault nomme des “dispositifs” (Surveiller et punir), c’est-à-dire des agencements techniques qui produisent des effets de pouvoir sans passer par l’interdit ou la contrainte. L’algorithme devient ainsi un opérateur de normativité silencieuse, orientant les gestes sans les prescrire.
Cette influence généralisée repose sur des logiques de captation attentionnelle, de renforcement émotionnel et de synchronisation sociale. Elle traverse les usages mondiaux : en Corée du Sud, au Nigeria ou en Turquie, les plateformes modèlent les formes de reconnaissance, les normes esthétiques et les rythmes d’interaction.
Toutefois, Bernard Stiegler (La société automatique) voit dans cette automatisation des affects une prolétarisation cognitive, où les facultés mentales sont dépossédées de leur puissance réflexive au profit d’automatismes induits. L’usager ne choisit plus : il réagit à des stimuli calibrés, dans une économie de l’attention qui substitue la pulsion à la décision.
Le surgissement massif d’un filtre sur Instagram, l’imitation virale d’un geste sur TikTok ou la récurrence d’un hashtag sur X sont autant de situations réelles témoignant d’une homogénéisation des conduites, orchestrée par des mécanismes invisibles mais profondément structurants.
*/ Une orientation tout aussi remarquable réside dans une adoption inégale: l’adoption inégale des dispositifs numériques renvoie à une asymétrie dans l’accès, la maîtrise et l’usage des technologies connectées. Cette asymétrie se décline selon la possession différenciée en capital culturel, les tranches d’âge, l’implantation géographique, les régimes d’attention, les conditions matérielles d’existence et les formes de socialisation technique.
Pour ce qui est du capital culturel, Pierre Bourdieu (La distinction) montre que les pratiques numériques sont socialement situées : les individus dotés d’un capital élevé mobilisent les technologies dans une logique stratégique, tandis que d’autres s’en tiennent à des usages distractifs ou mimétiques.
Quant aux tranches d’âge, les seniors manifestent souvent une distance technique, liée à une moindre plasticité cognitive ou à une socialisation antérieure, tandis que les juniors, nés dans l’environnement numérique, développent des usages intensifs, mais rarement réflexifs.
L’implantation géographique joue également un rôle structurant. David Harvey (Condition of Postmodernity) souligne que le numérique ne neutralise pas l’espace, mais le reconfigure selon des logiques de centralité et de marginalité : les territoires connectés ne sont pas équivalents, et les usages y sont conditionnés par l’infrastructure, la densité et l’accès aux ressources.
Le recours exclusif à des applications de divertissement dans les quartiers informels de Lagos, la difficulté à configurer les paramètres de confidentialité dans les zones rurales du Chiapas, ou la dépendance aux contenus viraux dans les périphéries de Casablanca sont autant de situations réelles témoignant d’une adoption inégale, qui renforce les écarts cognitifs et sociaux au sein des environnements connectés.
La numérisation sociétale s’est consolidée autour de deux vecteurs techniques structurants. Ce socle désormais installé laisse place à une dynamique d’influence généralisée, dont les modalités méritent d’être explorées.
II/ L’addiction programmée envers ces réseaux sociaux désormais globaux débouche sur des altérations majeures.
II.1 Ces altérations relèvent du champ cognitif.
*/ La réduction de l’attention et de la mémoire constitue une altération repérable: la réduction des capacités attentionnelles et mnésiques constitue une altération cognitive majeure induite par les environnements numériques. Elle se manifeste par une fragmentation de l’attention, une difficulté à maintenir la concentration sur des contenus longs, et une perte de profondeur mémorielle liée à la surcharge informationnelle.
Yves Citton (Pour une écologie de l’attention) montre que l’économie numérique repose sur une captation continue de l’attention, transformée en ressource exploitable. Cette captation engendre une instabilité cognitive : l’usager est sollicité en permanence, sans possibilité de consolidation mentale. Bernard Stiegler (La société automatique) ajoute que cette saturation attentionnelle provoque une désindividuation psychique, où la mémoire n’est plus construite mais externalisée dans les flux numériques.
La mémoire devient alors dépendante des supports techniques: les moteurs de recherche remplacent la remémoration, les notifications fragmentent les séquences mentales, et les interfaces imposent une logique de zapping. L’attention n’est plus un effort, mais une réaction.
Le recours systématique aux rappels automatisés dans les environnements professionnels de Tokyo, la difficulté à suivre un contenu long dans les salles de classe connectées de Montréal, ou la perte de repères temporels chez les adolescents hyperconnectés de São Paulo sont autant de situations réelles témoignant d’une réduction de l’attention et de la mémoire, inscrite dans les usages contemporains.
*/ La confusion entre réel et virtuel constitue une altération corrélative: la porosité croissante entre les sphères du réel et du virtuel constitue une altération cognitive qui affecte la perception, la mémoire et le jugement. Cette confusion ne relève pas d’une simple erreur de discernement, mais d’un glissement progressif des repères, induit par la saturation des environnements numériques et la simulation constante d’expériences.
Jean Baudrillard (Simulacres et simulation) montre que le virtuel ne se contente pas d’imiter le réel : il le précède, le remplace, et finit par le dissoudre dans une logique de simulation généralisée. Le sujet connecté ne distingue plus entre ce qui est vécu et ce qui est mis en scène, entre ce qui est produit et ce qui est reproduit. Cette indistinction affecte la capacité à construire une expérience située, à produire du sens à partir d’une réalité incarnée.
La confusion est renforcée par les dispositifs immersifs, les filtres esthétiques, les narrations algorithmiques et les interfaces émotionnelles. Le réel devient une variable parmi d’autres, ajustable, recomposable, manipulable.
Dans les quartiers branchés de Berlin, la mise en scène de soi sur les réseaux sociaux tend à supplanter l’expérience vécue. À Jakarta, des récits fictionnels circulent comme témoignages authentiques dans les forums communautaires. Dans les espaces commerciaux de Dubaï, les dispositifs de réalité augmentée transforment la perception immédiate en expérience scénarisée. Ces configurations concrètes traduisent une confusion croissante entre réel et virtuel, qui altère les repères cognitifs et fragilise la construction du sens.
Réduction de l’attention, affaiblissement de la mémoire, confusion entre réel et virtuel : autant de perturbations mentales qui altèrent la perception, désorganisent la stabilité cognitive et brouillent le rapport au monde.Elles débouchent désormais sur des transformations sociétales plus profondes.
II.2 Ces altérations débouchent aussi sur des transformations sociétales.
*/ Une transformation sociétale notable conduit à une productivité collective accrue: la généralisation des dispositifs numériques a conduit à une intensification des flux, une accélération des échanges et une optimisation des tâches, modifiant en profondeur les formes de coopération et les régimes de production. Cette productivité collective ne repose pas uniquement sur des gains techniques : elle s’appuie sur une mise en réseau des compétences, une synchronisation des efforts et une automatisation des processus.
Luc Boltanski et Ève Chiapello (Le nouvel esprit du capitalisme) montrent que les logiques de projet, de flexibilité et de transversalité sont devenues les matrices du travail contemporain, favorisées par les environnements numériques. Le collectif n’est plus une somme d’individus, mais une structure fluide, réactive, orientée vers la performance. Antonio Negri (Multitude) souligne que cette productivité repose sur une intelligence distribuée, où les singularités s’agrègent sans hiérarchie fixe, dans des dynamiques de coopération immatérielle.
Dans les incubateurs de Nairobi, les plateformes collaboratives de Tallinn ou les espaces de co-création à Medellín, les dispositifs numériques permettent une coordination rapide, une mutualisation des ressources et une production décentralisée. Ces configurations concrètes traduisent une productivité collective accrue, qui redéfinit les formes d’organisation et les temporalités du travail.
*/ Les minorités sociales peuvent aspirer à davantage d’égalité: les environnements numériques offrent aux groupes historiquement marginalisés des opportunités inédites de visibilité, de mobilisation et de reconnaissance. Cette dynamique ne supprime pas les inégalités structurelles, mais elle permet à certaines minorités de contourner les médiations traditionnelles et d’accéder à des espaces d’expression jusque-là verrouillés.
Nancy Fraser (Repenser la justice) distingue entre justice distributive et justice de reconnaissance : les dispositifs numériques, en favorisant l’auto-représentation et la circulation horizontale des discours, participent d’une reconfiguration de cette reconnaissance. Judith Butler (Défaire le genre) souligne que la performativité numérique permet aux identités minoritaires de se constituer publiquement, en dehors des normes dominantes, et de revendiquer leur légitimité.
Dans les réseaux militants afro-descendants de Salvador de Bahia, les collectifs féministes numériques de Tunis ou les communautés LGBTQ+ connectées de Manille, les plateformes deviennent des vecteurs d’émancipation, de coordination et de revendication. Ces configurations concrètes traduisent une aspiration renforcée à l’égalité, portée par les usages numériques.
Les environnements numériques transforment les facultés mentales, réorganisent les dynamiques sociales et ouvrent des perspectives d’action collective.Mais au-delà des effets observables, Benz interroge la structure même du numérique : son organisation par protocoles, ses mécanismes de sanction, et ses logiques de remédiation automatisée.
III/ BENZ PROTOCOL sanctionne et propose des remédiations.
III.1 Il sanctionne les dérives.
*/ Le Benz Protocol sanctionne les écarts comportementaux: dans les environnements numériques, toute conduite qui s’écarte des trajectoires prescrites est immédiatement repérée, corrigée ou neutralisée. Le Benz Protocol opère comme une instance régulatrice, qui sanctionne les écarts sans médiation humaine ni justification explicite. La norme ne se discute pas : elle s’impose, elle s’applique, elle reformate.
La sanction ne prend pas la forme d’un blâme visible : elle agit par invisibilisation, ralentissement, reformulation ou effacement. Pour renforcer son efficacité, le protocole intègre des seuils adaptatifs, des filtres comportementaux et des mécanismes de traçage qui permettent une surveillance continue et une correction anticipée. L’usager n’est pas invité à comprendre, mais à se conformer — ou à se voir exclu.
À Séoul, des comptes éducatifs sont désactivés pour instabilité comportementale. À Santiago, les publications militantes sont filtrées sans justification. À Varsovie, les messages professionnels sont reformulés avant même d’être envoyés.Ces configurations concrètes traduisent l’application du Benz Protocol : une sanction sans bruit, renforcée par des dispositifs techniques qui verrouillent l’écart.
*/ Le Benz Protocol sanctionne également la marchandisation des données personnelles: la captation des données personnelles ne relève pas d’un simple échange fonctionnel : elle constitue une extraction systématique d’informations sensibles, converties en valeur marchande sans consentement éclairé. Le Benz Protocol, en tant que logique régulatrice, sanctionne cette dérive en identifiant les mécanismes d’appropriation, de traçage et de revente comme des atteintes à la souveraineté numérique.
Face aux plateformes qui opèrent en dehors des seuils de transparence, il préconise une sanction accentuée : désindexation des contenus, blocage des flux, suspension des accès, voire neutralisation des circuits de redistribution. L’objectif n’est pas la régulation molle, mais l’interruption nette des logiques prédatrices.
À Lagos, des applications de santé collectent des données biométriques sans encadrement juridique. À Mumbai, des plateformes éducatives revendent les historiques de navigation à des tiers publicitaires. À Bucarest, des assistants vocaux enregistrent des fragments de conversations pour affiner des profils commerciaux.Le Benz Protocol ne tolère pas ces pratiques : il les désigne, les isole, les neutralise.
Le Benz Protocol identifie, isole et sanctionne les écarts — qu’ils soient comportementaux ou marchands — en amont de toute médiation. Mais il ne s’arrête pas à la sanction : il opère aussi des remédiations, en reformulant, en réorientant, en réintégrant les contenus dans des cadres normatifs compatibles.
I: Face aux dérives protocolaires et aux logiques de captation, une remédiation structurante s’impose : celle d’une régulation éthique des architectures numériques. Il ne s’agit pas d’ajouter des garde-fous périphériques, mais de repenser les fondements mêmes des dispositifs — leur conception, leur finalité, leur mode d’interaction avec les usagers.
Cette régulation ne peut être purement juridique ni simplement technique : elle doit intégrer des principes de transparence, de consentement éclairé, de non-discrimination algorithmique et de soutenabilité cognitive. Elle suppose une gouvernance distribuée, une traçabilité des processus décisionnels, et une capacité à rendre les architectures redevables de leurs effets.
Dans les laboratoires de design éthique à Helsinki, les plateformes coopératives de Barcelone ou les programmes de souveraineté numérique à Kigali, des modèles émergent : interfaces explicites, algorithmes audités, protocoles négociables.Ces configurations concrètes traduisent une remédiation de taille, où l’éthique devient une composante structurelle de l’environnement numérique.
*/ Une éducation critique aux usages sociétaux des réseaux doit être effectuée: La remédiation ne peut se limiter aux dispositifs techniques ou aux régulations institutionnelles : elle doit inclure une éducation critique aux usages sociétaux des réseaux. Il ne s’agit pas d’apprendre à utiliser les outils, mais de comprendre les logiques qui les sous-tendent, les effets qu’ils produisent, et les rapports de pouvoir qu’ils véhiculent.
Cette éducation suppose une déconstruction des automatismes numériques, une analyse des protocoles invisibles, et une capacité à interroger les normes incorporées dans les interfaces. Elle vise à former des usagers réflexifs, capables de discerner, de résister, et de reconfigurer leurs pratiques en fonction d’un horizon éthique et politique.
L’école, dans ce cadre, ne peut se contenter d’enseigner des compétences techniques : elle doit devenir un lieu de formation critique, où les usages numériques sont pensés comme des objets sociaux, politiques et cognitifs. Elle est appelée à articuler savoirs techniques et conscience des enjeux, pour que les élèves ne soient pas seulement opérateurs, mais interprètes et acteurs des environnements connectés.
Dans les ateliers de littératie numérique à Recife, les programmes d’analyse critique des algorithmes à Montréal ou les modules d’auto-défense informationnelle à Dakar, des formes d’éducation émergent : elles ne transmettent pas des compétences, elles construisent des consciences. Ces configurations concrètes traduisent une remédiation active, où l’apprentissage devient une forme de résistance. Le Benz Protocole propose de les poursuivre et les accentuer.
L’analyse menée a permis de mettre en évidence la manière dont les réseaux sociaux, en tant que dispositifs techniques et culturels, participent à une programmation des usages susceptible de générer des formes d’addiction. Cette programmation, fondée sur des architectures algorithmiques et des logiques de captation, s’inscrit dans une configuration sociétale numérisée qui modélise les conduites et oriente les attentions. Les conséquences observées, tant sur le plan cognitif que sociétal, traduisent une altération des fonctions mentales fondamentales et une reconfiguration des dynamiques collectives. Face à ces dérives, le BENZ PROTOCOL propose des sanctions ciblées et des remédiations structurantes, articulant régulation éthique et éducation critique. Ainsi, se dessine la nécessité d’une pensée des environnements numériques qui ne se limite pas à l’usage, mais interroge les conditions de leur légitimité, de leur impact et de leur transformation.
Annexe 1 — Références théoriques
Alexander R. Galloway – Protocol: How Control Exists After Decentralization (III.1.1)
Antoinette Rouvroy & Thomas Berns – Gouvernementalité algorithmique et perspectives d’émancipation (III.1.1)
Shoshana Zuboff – The Age of Surveillance Capitalism (III.1.2)
Éric Sadin – La silicolonisation du monde (III.1.2)
Dominique Cardon – À quoi rêvent les algorithmes (III.2.1)
Florent Michelot & Simon Collin – La compétence numérique en contexte éducatif (III.2.1)
Neil Selwyn – Education and Technology: Key Issues and Debates (III.2.2)
Simon Collin & Nicolas Guichon – Les approches critiques du numérique en éducation (III.2.2)
Annexe 2 — Configurations concrètes
Séoul : désactivation de comptes éducatifs pour instabilité comportementale (III.1.1)
Santiago : filtrage automatisé de publications militantes (III.1.1)
Varsovie : reformulation anticipée de messages professionnels (III.1.1)
Lagos : collecte non encadrée de données biométriques par des applications de santé (III.1.2)
Mumbai : revente des historiques de navigation par des plateformes éducatives (III.1.2)
Bucarest : enregistrement de conversations par assistants vocaux à des fins commerciales (III.1.2)
Helsinki : design éthique des architectures numériques (III.2.1)
Barcelone : plateformes coopératives intégrant des protocoles négociables (III.2.1)
Kigali : programmes de souveraineté numérique (III.2.1)
Recife : ateliers de littératie numérique (III.2.2)
Montréal : analyse critique des algorithmes en contexte éducatif (III.2.2)
Dakar : modules d’auto-défense informationnelle (III.2.2)
Séoul : désactivation de comptes éducatifs pour instabilité comportementale (III.1.1)Santiago : filtrage automatisé de publications militantes (III.1.1)Varsovie : reformulation anticipée de messages professionnels (III.1.1)Lagos : collecte non encadrée de données biométriques par des applications de santé (III.1.2)Mumbai : revente des historiques de navigation par des plateformes éducatives (III.1.2)Bucarest : enregistrement de conversations par assistants vocaux à des fins commerciales (III.1.2)Helsinki : design éthique des architectures numériques (III.2.1)Barcelone : plateformes coopératives intégrant des protocoles négociables (III.2.1)Kigali : programmes de souveraineté numérique (III.2.1)Recife : ateliers de littératie numérique (III.2.2)Montréal : analyse critique des algorithmes en contexte éducatif (III.2.2)Dakar : modules d’auto-défense informationnelle (III.2.2)